Codage rp lily

Je n’ai pas l’habitude de me laisser aller à mes émotions de cette façon. Du moins, ce n’était pas le cas avant ma mort. J’étais beaucoup plus forte avant, entraînée par la froideur et les insultes de ma sœur, sans aucun doute. Avant, une carapace me recouvrait, une carapace que seul Severus, et peut-être Remus, savaient pénétrer jusqu’à ma septième année. Être une sang-de-bourbe dans un monde tel que le nôtre n’a jamais été facile, surtout en sachant qu’une guerre se déclarait pour mettre à mal tout ceux qui sont comme moi. On apprend à se protéger. J’ai dû le faire. Mes barrières sont tombées. À quoi bon entretenir ces murs si les fondations ont pu être brisées aussi facilement par mon bourreau ? Non. Je ne me retiens pas. J’ai vécu beaucoup de belles choses, mais beaucoup de deuil également depuis mon retour. J’ai pleuré Severus avant et après ma mort. Je n’ai pas de raison de ne pas le faire maintenant.

Mais je ne le fais pas.

Peut-être est-ce de l’orgueil mal placé. Peut-être ai-je simplement envie de rester force face à Severus qui lui, est bien plus fort que moi, qui l’a toujours été. Il le reste encore, après tout ce que je lui dis. Mais il n’est pas de glace. Je vois l’émotion passer dans ses yeux prisonniers de mon regard. Ses lèvres tracent un sourire léger. Il approche de moi en prenant la parole, doucement, sans me brusquer. Je sens qu’il mesure chacun de ses pas, comme pour m’épargner. « Je crains que tu ne t'illusionnes, malheureusement, sur mon compte. Le Severus que tu as connu est mort le trente et un octobre mille neuf cent quatre-vingt-un avec toi, à Godric’s Hollow. »

Mon cœur se brise. Il git juste là, entre nous deux, par terre, et nous sommes en train de le piétiner. Je ne m’étais pas trompée. Ma mort l’a anéanti. J’ignore complètement qu’il est celui qui a rapporté la prophétie à son maître de l’époque, mais je ne lui en voudrais pas pour autant si je le savais. Savoir que ce fut l’erreur qui l’a anéanti aussi ne changerait rien à l’émotion que je vis, et qu’il vit lui aussi. Je perçois le léger tremblement dans sa voix si grave. Il contient ses émotions, comme je l’aurais sans doute fait avant. Mais je ne suis plus force. J’ai cessé de l’être quand j’ai été atteinte par cette lueur verte, dans la chambre de mon fils, cette lueur qui m’a laissé cette cicatrice semblable à celle d’Harry, sur la poitrine.

Sa main sur mon épaule, il m’attire vers lui et me serre dans ses bras. Une vague de chaleur m’envahit et mes larmes se mettent à couler en silence sans que j’en ais le contrôle. Malgré ma peine, je parviens à me sentir bien, là. Je n’ai pas envie que son étreinte se termine. Je n’ai pas envie de le perdre. Si j’ai perdu le contrôle sur mes larmes, j’ai apparemment perdu celui sur mes mains aussi. Je me blottis naturellement contre lui, m’accrochant à sa chemise. Mon corps ne répond plus à mon cerveau visiblement décédé. Mais ce qui m’achève, ce sont ses mots. « La dernière fois que je t’ai enlacée, Lily, c’était ton cadavre que je tenais. Et Harry hurlait à côté de nous. » Larmes salées plus abondantes, je me sens légèrement trembler dans ses bras, et je ferme les yeux. Il est venu chez moi ? Il savait. Il savait et il voulait me sauver. Qu’aurait-il fait ? Se serait-il opposé à Voldemort s’il l’avait trouvé, baguette braquée sur moi tandis que je le suppliais de ne pas faire de mal à mon fils ? « J’aurais dû le réconforter, mais j’étais incapable de lâcher le corps encore tiède de la femme que j’aimais. Dont j’ai continué à aimer le souvenir toute ma vie durant. »

J’échappe un soupir de tristesse. Pourquoi ? Pourquoi maintenant ? Cet aveu me fait un grand plaisir, étrangement, mais me brise surtout le cœur. Severus a tellement souffert à cause de moi. J’ai été tellement aveugle à son intérêt envers ma personne. Si j’avais su, sans doute que les choses se seraient passées différemment. Je n’ai aucun doute là-dessus. Severus était la personne la plus importante dans ma vie à une époque. Si j’avais su qu’il avait de tels sentiments à mon égard, je ne doute même pas qu’il aurait pu avoir sa chance. Ça aurait été la suite logique de toute façon, vu comment nous étions inséparables. James avait beau me déclarer sa flamme devant tout le monde, je finissais toujours par partir avec Severus pour aller ailleurs et qu’on soit tranquilles. Malheureusement, j’ai reçu du venin de sa part quand il m’a insulté. Et il le sait. « C’est cela que j’aurais dû te dire quand nous avions quinze ans. Que je t’aimais. Il ne s’est pas passé un jour, une heure, une minute sans que je ne regrette mon mutisme de ce soir-là. Je suppose que c’est un peu tard, désormais. » J’ai un goût amer de culpabilité en bouche alors qu’il m’a lâché. Je n’ai pas eu le choix que de lâcher sa chemise, bien que ce fut difficile. J’ai peur qu’il se soit éloigné à tout jamais de moi, que je n’aurai plus jamais le loisir d’être ne serait-ce qu’une amie. Il est si près, mais pourtant si loin. Et j’ai soudainement froid.

Mes mains replacent sa chemise que j’ai froissé légèrement. Je n’ose pas lever les yeux sur les siens, mais pourtant je le fais. Je continue de pleurer en silence, me doutant que les élèves se poseront des questions éventuellement. Je me fous normalement des rumeurs qui peuvent courir, mais cette fois il s’agit de ma relation avec Severus, et ça je ne m’en moque pas. Je le regarde réajuster son chapeau, puis je baisse les yeux sur mes mains. L’une d’elle est serrée en un poing. Je suis encore en train de m’accrocher à la note que Severus m’a écrite. Elle est chiffonnée maintenant. Et malgré ma volonté, je n’arrive pas à ouvrir le poing. Je ne veux pas ouvrir la main et laisser s’échapper les mots de Severus. Il reprend d’ailleurs la parole, m’expliquant qu’il n’a pas choisi de camp, ne croyant ni au bien, ni au mal. Il n’a fait que se racheter, vivre dans le passé, et du coup, je ne lui en veux pas de vouloir passer à autre chose. C’est même la meilleure chose à faire. J’espère seulement avoir une place, quelle qu’elle soit, dans cette nouvelle vie qu’il veut se bâtir. Ne serait-ce que d’être la gentille bibliothécaire à qui il aime dire bonjour le matin avant les cours, ou avec qui il aime prendre le déjeuner une fois de temps en temps. Juste un bonjour le matin me suffira.

Visiblement, je suis désespérée. Et ça me désespère.

Les yeux toujours sur lui, je regarde ce qu’il me montre alors. Ces cicatrices me percent le cœur. S’il m’avait permis de regarder plus longtemps, j’aurais presque pu sentir le poison du serpent dans mes propres veines. Harry m’a dit qu’il s’agissait du serpent du Seigneur des Ténèbres qui l’avait tué, et qu’il était mort dans ses bras, à regarder dans ses yeux. Maintenant, je me dis qu’il devait regarder dans les miens. J’ignore si j’ai eu une vie de fantôme, mais j’espère secrètement avoir pu le bercer dans la mort. J’espère que je l’ai accueillie les bras ouverts, au moins, et qu’il a été apaisé.

Du moins, si ce n’est pas moi dans la mort qui l’a apaisé, il semble l’être à présent, et je ne peux que supporter ça. Il a passé trop de temps à vivre pour moi, pour faire vivre mon souvenir, pendant qu’Harry, rien que par son physique, faisait vivre son père. Je soutiens le regard qu’il me lance et lui sourit tristement aussi tandis que j’essuie mes larmes délicatement. Je dois être forte.

Sois forte.

Je l’écoute attentivement terminer. Je n’accroche pas vraiment sur ses derniers mots. Je ne me soucis pas vraiment de cela. Peu importe où il se place dans la vie, par rapport à moi, je ne serai plus jamais son ennemie. C’est une promesse que je me fais à moi-même, dans la seconde. Être son ennemie est difficile. S’il décide d’être le mien, ça le regarde, mais en ma personne, il aura toujours une amie vers qui se tourner s’il en a besoin, malgré mes 21 ans. « Je… »

Sois forte. J’essaie de l’être, mais j’ai envie de me remettre à pleurer. J’inspire donc profondément et ferme les yeux pour retrouver mon calme. Je ne veux pas pleurer. Je veux rester forte. Je veux le soutenir. Quand je me sens enfin prête, je rouvre les yeux et sourit sincèrement. « Je te souhaite d’être heureux Sev. Sincèrement. Et j’espère que j’aurai toujours une petite place dans ta vie, peu importe celle que tu voudras bien me réserver. » Amie, ennemie, rivale, ou bien souffre-douleur, ça m’est égal. Tant que je peux échanger un bonjour avec lui une fois de temps en temps. Je ne devrais pas m’accrocher à lui de cette façon, mais je n’y peux rien. Je peux être forte, mais pas à ce point-là. Pas aujourd’hui en tout cas.

Je penche la tête et ouvre mon poing pour relire la note chiffonnée dans mes mains. Je retiens la liste dans ma tête et contourne mon bureau pour ouvrir un tiroir dans lequel tout est soigneusement rangé. Je sors une enveloppe et y insère la note, devant toutes les autres. J’aurais voulu pouvoir lui dire qu’il n’est pas trop tard, mais ma relation avec James n’est peut-être pas à son meilleur, il reste que je l’aime malgré tout, et que je suis toujours mariée.